Description
PRÉCIEUX MANUSCRIT AUTOGRAPHE SIGNÉ Émile Zola, daté du 12 mai 1900.
En pleine affaire Dreyfus, Zola réclame la fin de la seconde guerre des Boers :
"Je fais voeux pour que l'abominable guerre entre les
Anglais et les Boers finisse au plus tôt,
et que, s'il est nécessaire, le monde civilisé tout entier
se lève et impose la paix aux combattants,
au nom de la fraternité humaine.
Paris 12 mai 1900.
Émile Zola
Après l'échec d'une première tentative de s'approprier le Transvaal en 1880 (première guerre des Boers), les Britanniques convoitent le plus important gisement d'or au monde découvert dans le district Witwatersrand en 1887. Un déplacement massif des colons Anglais de Johannesburg vers le Witwatersrand pousse les Boers à taxer lourdement l'industrie aurifère et à leur refuser le droit de vote. Après l'échec d'une tentative de coup d'état montée par les Anglais (1895) et le meurtre du chef de la police Boers (1898), la seconde Guerre des Boers est déclarée le
"La guerre des Boers marque un moment de crise non seulement dans les relations diplomatiques franco-anglaises mais aussi dans le regard porté par la majorité des intellectuels français qui vivent l'avènement de la mauvaise Angleterre à la manière d'une trahison amoureuse. " Cette crise "a lieu au moment même où les intellectuels français se trouvaient eux-mêmes pris dans une crise nationale. L'affaire Dreyfus en éclaire bien des aspects. Les intellectuels nationalistes profitèrent de la guerre des Boers pour s'inventer leur affaire Dreyfus et prendre au piège de leurs propres valeurs des intellectuels dreyfusards, souvent indulgents face à l'Angleterre."
Écrits le 12 mai, jour même d'une attaque Boers sur garder le siège de Mafeking, les voeux de Zola pour la paix " au nom de la fraternité humaine" reflètent donc a la fois un mouvement global des intellectuels français, mais aussi le positionnement des Dreyfusards dans une « contre-affaire Dreyfus » instrumentalisée par les nationalistes.
La remarque au crayon gras bleu "Bataille 1 col[onne]" - outil traditionnellement employé par les imprimeurs - suggère que cette déclaration était, à l'instar du J'accuse, préparée pour paraitre en première colonne d'un journal relatant probablement la bataille du 12 mai. Nous n'avons pu identifier le journal qui la publia ; le document semble inconnu des bibliographies les plus documentées.
Document historique.
Christophe Prochasson - Une crise anglaise de la pensée française ? Les intellectuels français face à l'Angleterre au temps de Fachoda et de la guerre des Boers, 2003.